Ensemble nous sommes plus forts, mais sommes-nous plus intelligents ?
Nous entamons la seconde partie de ce dossier qui se veut explorer le concept de l’intelligence collective du point de vue scientifique. Cette fois-ci, nous allons nous pencher sur une étude réalisée en 2023, qui révèle comment l’intelligence collective se manifeste dans un cadre scolaire.
L’intelligence collective existe dans la classe
L’intelligence collective n’est pas un concept absent des sciences de l’éducation, et c’est ce que souhaite prouver la doctorante Sylvie FORNERO et le professeur des universités Jean-Claude REGNIER en 2023 par le biais d’une étude nommée “Intelligence collective dans la classe : Impact des interactions et autres facteurs sur l’intelligence collective dans des groupes de travail restreints au collège ».
L’objectif de cette étude était d’explorer le concept de l’intelligence collective dans le contexte éducatif, plus particulièrement de déterminer si les enfants, comme les adultes, peuvent vivre une expérience d’intelligence collective lors de travaux de groupe. Ainsi, ils ont examiné comment les interactions entre élèves, le rôle de l’enseignant et d’autres variables influencent l’émergence de l’intelligence collective.
Pour ce faire, ils ont mené cette étude au sein d’un collège lyonnais, impliquant des élèves de 6ème, rassemblés en 9 groupes, confrontés à des problèmes de mathématiques. En utilisant des questionnaires, des observations et des analyses d’interactions, ils ont cherché à comprendre les dynamiques qui favorisent ou inhibent l’intelligence collective.
Ils ont examiné une série de processus et d’états émergents tels que la communication, la collaboration, la gestion du temps, et les activités cognitives. Ils ont également pris en compte des états émergents comme la confiance, le flow (absorption cognitive), l’inclusion de tous, la convergence des avis, le plaisir de travailler ensemble et la satisfaction du résultat obtenu.
De plus, chaque groupe a été évalué sur une échelle de 0 à 6 pour estimer leur collaboration et déterminer si elle était profitable ou non, ce qui a permis d’évaluer l’intelligence collective de chaque groupe.
Voici ce que l’on en retient principalement de l’étude :
- Encourager la divergence : l’élève qui ose penser différemment dans les groupes est un catalyseur qui peut enrichir et dynamiser la réflexion collective grâce à ses idées parfois inattendues. Favoriser l’originalité de pensée et permettre à la convergence des idées sont des éléments importants, bien que cela comporte le risque que certains élèves soient moins constants ou attentifs. Ce type d’élève a besoin de collaborateurs qui le complètent, pour que le groupe puisse tirer le meilleur parti de leur créativité.
- Un double leadership : Les résultats mettent en lumière que les groupes les plus efficaces ne sont pas nécessairement ceux qui suivent un seul leader, mais ceux qui bénéficient de contributions diversifiées. Les membres les plus loquaces ne sont pas toujours ceux qui apportent les idées les plus pertinentes. Ainsi, une distribution équilibrée du leadership et des opportunités de parole entre les membres est un facteur clé pour renforcer l’intelligence collective d’un groupe.
- Accueillir la complexité des situations : les observations montrent que l’intelligence collective peut émerger même au sein de groupes où l’on ne retrouve pas les attentes classiques de comportement comme une bonne qualité d’écoute, le respect des autres, l’ouverture ou encore l’empathie. Elle peut donc se développer même dans des environnements animés et apparemment chaotiques. Il en ressort donc qu’en naviguant dans la complexité et en harmonisant les contradictions internes du groupe, cela favorise la mobilisation de l’intelligence collective.
- Nécessité de règles de fonctionnement souples : L’intelligence collective ne se limite pas aux groupes calmes et respectueux des règles, mais se manifeste souvent au sein de dynamiques de groupe variées, où il y a un mélange complexe de comportements, y compris celles où règnent détente et d’humour, qui semblent consolider les liens du groupe. Ces derniers peuvent paraître contre-productifs, cependant, ils contribuent souvent à renforcer la cohésion et à favoriser un esprit d’équipe solide.
- Posture enseignante adaptée aux besoins des groupes : la manière dont l’enseignant interagit avec les groupes peut soit encourager, soit inhiber l’intelligence collective. En fournissant des éclaircissements au moment adéquat et en orientant discrètement le processus sans dominer le sujet, l’enseignant facilite un apprentissage autonome et une résolution de problème collaborative. Il faut donc recourir à une approche pédagogique flexible et agile afin de permettre aux élèves de progresser dans leur réflexion et découvertes.
- Le problème soumis doit être complexe : il est essentiel de présenter aux participants un problème suffisamment complexe pour encourager la réflexion et la collaboration entre les élèves, où ils vont devoir trouver des solutions mais aussi se mettre d’accord sur une façon commune de travailler, en écoutant et intégrant les idées des autres. Cependant, il ne doit pas être trop difficile afin d’éviter la frustration et le découragement des participants.
L’intelligence collective dans l’éducation n’est pas seulement une question de regrouper des élèves pour travailler ensemble. Pour l’atteindre, cela nécessite une attention particulière à la dynamique de groupe, à la pédagogie et à l’environnement d’apprentissage. L’étude de Fornero et Regnier ouvre des perspectives fascinantes sur la manière dont nous pouvons cultiver cette intelligence pour préparer les élèves à un avenir collaboratif.
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